Instrument qui a véritablement trouvé ses lettres de noblesse grâce au jazz, le saxophone fascine toujours autant les nouvelles générations. En voici quatre exemples récents : Donny McCaslin, Jowee Omicil, Ben Wendel et Luigi Grasso.

Donny McCaslin ©Jimmy FontaineA l'image de Kenny Garrett qualifié de "dernier saxophoniste" de Miles Davis, Donny McCaslin gardera l'étiquette de "dernier saxophoniste" de David Bowie pour sa participation à "Blackstar", ultime opus de cette icone du rock.

Même si sa carrière était déjà couronnée de succès avant cette rencontre et se poursuit aujourd'hui avec une nouvelle approche musicale, nettement plus orientée vers les terres du rock. Surtout à l'écoute de son dernier CD, "Blow" (Motéma/PIAS). Avec pas moins de quatre vocalistes, dont Gail Ann Dorsey qui avait collaboré avec David Bowie, le très inventif saxophoniste-ténor californien, pourtant élevé dans le jazz et classé comme tel, s'amuse à brouiller les pistes en apportant de nouvelle couleurs sonores et en explorant de nouveaux territoires entre jazz alternatif, rock et électro. Un album aventureux et risqué qui bouscule certaines lignes et qui ne manque pas de singularité. 

Et avec la complicité de membres du groupe qui avaient participé à l'élaboration de "Blackstar" comme Jason Lindner (claviers), Tim Lefebvre (basse) et Mark Guiliana (batterie).

(Il sera en concert le 10 octobre à Tours, le 12 au New Morning à Paris et le 13 à Nice).

Il y a quelque chose qui relève de l'utopie dans la démarche musicale de Jowee Omicil.

JoweeOmicil ©Renaud Monfourny En effet, le jeune musicien canadien d'origine haïtienne est un (génial ?) touche-à-tout instrumental - s'il joue principalement des saxophones, il pratique également la flûte, les claviers, le cornet, la clarinette et chante - qui a depuis son apparition sur scène fait d'un bouillonnant mélange de tous les styles de musiques sa singulière marque de fabrique. Un cocktail dans lequel sont conviés jazz (clin d'œil à Thelonious Monk), rythmes africains et caribéens, Bach et Mozart et parfums d'Orient.

Un art du métissage que l'on retrouve dans "Love Matters" (Jazz Village/PIAS),sa dernière production. Une ode au multiculturalisme et à certain universalisme musical qui convoque diverses origines pour créer une certaine originalité. Si le résultat est intéressant, il doit encore convaincre en raison d'un style indéfinissable qui parfois égare l'auditeur.

(En concert le 11 octobre au New Morning à Paris).

Ben Wendel©Josh GolemanPoly-instrumentiste, le musicien canadien Ben Wendel est surtout connu pour être un des membres fondateurs du groupe "Kneeboby" à l'aube des années 2000.

Installé à New York, le saxophoniste, bassoniste et compositeur a aussi joué notamment avec le pianiste Tigran Hamasyan, le rappeur Snoop Dogg et même Prince. Avec "The Seasons" (Motéma Music), il vient de concrétiser un projet dévoilé pour la première fois en 2015 sur Youtube, composé de douze morceaux originaux dédiés aux douze mois de l'année, réalisé en duo avec des acolytes comme Joshua Redman, Julian Lage et Ambrose Akinlmusire notamment.

Et c'est à la tête d'un quintet à fortes personnalités - Aaron Parks (piano), Gilad Heckselman (guitare), Matt Brewer (contrebasse) et Eric Harland (batterie) - qu'il vient de porter son projet vers une autre dimension. Un espace exigeant et excitant qui offre à son leader inspiré et ses séduisants partenaires de nouveaux horizons pour laisser libre cours à la création collective.

(Il sera en concert les 14 & 15 octobre au Duc des Lombards à Paris).

Luigi Grasso ©Laurent MeyerLe multi-saxophoniste italien - mais son préféré est l'alto - adopté par Paris, Luigi Grasso, principalement est connu pour être celui qui accompagne régulièrement la chanteuse China Moses dont il est le directeur musical.

Parallèlement à ce travail,prenant, le jeune leader - dont les influences s'appellent Charlie "Bird" Parker, Cannonball Adderley, Gigi Gryce, voire Art Pepper et des barytons comme Pepper Adams, mais dont le véritable mentor est le vénérable (88 ans) pianiste Barry Harris - entretien la flamme d'un néo-post hard-bop depuis plusieurs mois au Sunside/Sunset à la tête d'un très solide nonette baptisé "The Greenwich Session".

Cet ensemble - qui n'est pas sans rappeler celui de Miles Davis à la fin des années 1940 ou le Tentet du pianisteTadd Dameron de la même époque - et son très talentueux, expressif et éloquent leader, surtout au saxophone baryton, viennent de graver "The Greewich Session - Invitation au voyage" (Camille Productions/Socadisc). Un bel et surprenant album qui renferme onze compositions et arrangements personnels de Luigi Grasso qui évoquent ici et là cette forme de jazz très écrite et élaborée dans laquelle la palette orchestrale originale (cors anglais et de basset, clarinette basse) donne une coloration savante et classique. Agrémentée de soli souvent lumineux.

Dans un jazz actuel qui est une véritable éponge musicale, cette alliance des timbres et des voix (dont celle de China Moses) est un authentique défi. Relevé avec brio par Luigi Grasso !

(En concert le 5 octobre à La Petite Halle à La Villette à Paris)

Crédits photos : 

Donny McCaslin©Jimmy Fontaine

Jowee Omicil©Renaud Monfourny

Ben Wendel©Josh Goleman

Luigi Grasso©Laurent Meyer