Marcus Miller©Marie-Evelyne ColonnaDoyen des festival de jazz en Europe, "Jazz à Juan" d'Antibes/Juan-les-Pins (du 9 au 22 juillet) - qui a été le premier des grands festivals de l'été en France à dévoiler sa programmation - a mis l'accent pour sa 60è édition sur les fondamentaux qui ont conduit à sa naissance et à sa réputation internationale, à savoir le jazz, avec cependant des détours vers la soul et le funk.

Présentée conjointement dans le cadre du Bal Blomet à Paris, par Audouin Rambaud, adjoint au Maire délégué au Tourisme, et Philippe Baute, directeur/directeur de l'Office du tourisme, l'édition 2020 fait la part belle à certains grands noms qui ont fait la légende de la manifestation, tout en s'ouvrant à la nouvelle génération.

Si l'on fait abstraction d'Ibrahim Maalouf, qui s'est toujours refusé à "faire du jazz" (18), et une soirée hip-hop funky avec "The Soul Rebels", de la Nouvelle-Orléans, et "The Roots" (11), Marcus Miller, Herbie Hancock, Wynton Marsalis, Joe Lovano et Gregory Porter, notamment feront vibrer une Pinède Gould qui a vu, en six décennies, défiler tout le gotha du jazz et être le théâtre de concerts mythiques, comme celui de John Coltrane et de son Quartet en juillet 1965, avec l'unique prestation "live" de son œuvre, "A Love Supreme".

Ce sera à deux figures du jazz funky, le saxophone phénomène au sein de l'orchestre de James Brown, Maceo Parker, et au bassiste "slappeur" (et clarinettiste basse) Marcus Miller, qui s'est déjà produit 14 fois à Juan dans diverses formules, d'ouvrir le bal (9 juillet) à grands mélanges de funk, de soul, de jazz et des rythmes binaires. Une carte blanche sera donnée par ailleurs à Marcus Miller qui fera monter sur scène des "very special guests", dont les identités sont gardées secrètes pour l'heure.Marcus Miller DR

Quant à la clôture (22 juillet), elle se fera avec une légende du rhythm'n'blues, multi-primée aux Grammy Wards et génératrice de tubes, Lionel Richie, et surtout avec une nouvelle et jeune voix venue du Canada (originaire d'Haïti), la chanteuse Dominique Fils-Aimé, qui charme par la suavité de son timbre et sa grâce.

Temps forts du jazz

Les temps forts du jazz seront, à n'en pas douter, à mettre à l'actif de musiciens qui ont été des acteurs et des précurseurs (de plus en plus rares en raison de leur âge avancé) en la matière ou de ceux qui perpétuent la tradition et l'esprit du jazz dans son essence.

A bientôt 80 ans (le 12 avril prochain), Herbie Hancock (17 juillet), dont la première apparition à Juan remonte à... 1963 au sein du Quintet de Miles Davis, devrait faire chauffer ses claviers aux accents du jazz binaire, électrique et de fusion et survoler près de sept décennies d'une immense carrière.
Le tandem Lee Ritenour (guitare)/Dave Grusin (claviers), Wynton Marsalis (trompette) et Joe Lovano (saxes), incarnent cette génération intermédiaire qui, élevée dans le respect de l'héritage, assure depuis le passage de témoin.

Si les premiers puisent leur inspiration dans le jazz-rock hyper rythmé (13 juillet) - en ouverture du chanteur Gregory Porter - le second, aux commandes du big band "Jazz at Lincoln Center Orchestra" (JLCO), s'est résolument engagé, depuis plusieurs années, dans la préservation d'un patrimoine et d'un répertoire qui a constitué la quintessence du jazz (10 juillet).

Quant au troisième, "sideman de luxe" dans l'orchestre de Diana Krall sur la même scène en 2019 et considéré comme une des pointures au panthéon du saxophone moderne actuellement, il étrennera son nouveau quintet "Sound Prints", en binôme avec Dave Douglas (trompette).Joe Lovano©Jimmy Katz ECM Records

Un festival digne de Jazz à Juan se doit d'avoir des exclusivités. Au nombre de deux, avec deux divas.

En l'occurrence avec Melody Gardot qui fera son show accompagnée de l'Orchestre Philarmonique de Monte-Carlo (12 juillet - en première partie le Trio d'Eric Legnini).

Et surtout une des dernières vraies divas de la grande époque de la soul music et du rhythm'n'blues des années '60, Diana Ross (bientôt 76 ans - 16 juillet), égérie de la Motown, qui, avec ou sans son groupe vocal 100% féminin, "The Supremes", a collectionné les succès et les récompenses. Ce sera sont premier concert à Juan.

Quid de la nouvelle génération ?

Soucieux de donner sa chance à la relève qui devrait assurer la pérennité du jazz et de son existence, la manifestation a invité plusieurs figures en devenir.

Joey Alexander©Meredith TruaxParmi celles-ci, le tout jeune et brillant pianiste originaire de Bali, Joey Alexander (10 juillet - 16 ans à peine), adoubé par Herbie Hancock, et l'excellent virtuose français de l'accordéon Vincent Perirani (14 juillet), associé notamment à son compagnon de route, Emile Parisien (saxophone-soprano) au sein du quintet "Living Being", qui pratique une musique très audacieuse et extrêmement survoltée en décibels puisant dans les répertoires de Led Zeppelin, Sonny & Cher et... Henry Purcell !

Place encore à la jeunesse avec la percutante batteuse/chanteuse et compositrice française Anne Pacéo (18 juillet), le Tom Peng New Grass Band, venu de Shanghai, dont la musique originale s'inspire de celles de Mongolie et de Chine, voire du sud des Etats-Unis (!), et le pianiste israélien Tom Oren (14 juillet), ancien accompagnateur du contrebassiste Avishai Cohen et du saxe-ténor Eli Degibri.
Sans oublier la traditionnelle soirée gospel (19 juillet) avec le duo africain Amadou & Mariam et les Blind Boys of Alabama.

En marge du festival, sera proposée la "Jammin' Summer Session", émanation estivale du marché annuel du jazz baptisé "Jammin' Juan", qui est le creuset des découvertes et des révélations de demain. L'édition 2020 se tiendra justement du 2 au 5 décembre.